Adoption et addictions : comprendre le lien pour mieux accompagner
L’adoption est souvent perçue comme une seconde chance. Pourtant, de nombreuses personnes adoptées rencontrent des difficultés avec les addictions.
Ces dépendances ne sont pas anodines : elles apaisent souvent une souffrance émotionnelle profonde liée à l’histoire adoptive. Voyons pourquoi ce lien existe, comment il se manifeste, et comment y répondre.
Le lien entre adoption et addictions : un mécanisme d’adaptation à la souffrance
L’addiction n’est pas qu’un excès de consommation : c’est souvent une tentative de régulation émotionnelle. De nombreuses études, dont celles menées par Lisa Coppola (Boston Post Adoption Resources), montrent que les personnes adoptées ont un risque plus élevé de développer des conduites addictives :
« La toxicomanie peut être considérée comme une tentative de solution à la tourmente interne plutôt que comme la cause »
En TCC (Thérapie Cognitivo-Comportementale), je remarque que face à tout problème, le cerveau développe immédiatement une stratégie pour le régler ou le rendre moins pénible. Cela se fait souvent de deux façons :
- La confrontation : Nous prenons conscience du problème sur le long-terme et développons une stratégie de changement, souvent inconfortable dans les premiers temps mais concluante par la suite.
- La fuite : Nous trouvons une solution « facile » et immédiate mais ne réglant le problème qu’à court-terme.
Dans le cas des addictions, la stratégie de confrontation n’est pas que psychique mais également physiologique à du cause du sevrage. C’est pour cela qu’il faut être « agissant » mais tout en étant patient.
Témoignage de Marine : « Boire me permettait de ne plus penser »
Marine, adoptée à l’âge de 6 ans, témoigne de ses conduites addictives à l’adolescence :
« C’est de boire et de fumer. ça permet d’apaiser et de sortir, de ne plus y penser… entre 15 et 19 ans… ma thérapeute m’a dit : ‘c’est évident, Marine, qu’il y a un lien entre ta souffrance et tes addictions’ »
— lejournalduneadoptee.com
Marine met des mots sur une réalité vécue par beaucoup : un besoin d’apaiser une douleur diffuse, parfois inconsciente, en s’échappant dans des comportements à risque.
Témoignage anonyme : « Je me détestais sans savoir pourquoi »
Sur le forum Reddit, un utilisateur adopté partage son parcours de dépendance à l’alcool et aux médicaments :
« J’ai commencé à boire au lycée, sans savoir pourquoi je me détestais tant… J’ai presque 3 ans de sobriété et j’en suis fier. »
— reddit.com/r/Adoption
Ce témoignage confirme le poids invisible de l’histoire adoptive, et la difficulté à faire le lien entre souffrance psychique et addiction, surtout sans accompagnement.
Pourquoi les personnes adoptées sont-elles plus vulnérables aux addictions ?
L’être humain est un être rationnel et émotionnel. Nous pouvons savoir beaucoup de choses sur nos blessures personnelles sans pour autant réussir à changer notre mode de vie, ni cette fragilité qui se manifeste au fond de nous.
Les recherches cliniques et les observations en psychothérapie montrent plusieurs facteurs communs à ceci :
1. Blessures d’attachement
Le sentiment d’abandon, même inconscient, peut provoquer une angoisse chronique et une difficulté à faire confiance, y compris à soi-même. Il est souvent le résultat de la blessure primitive qui est la séparation entre la mère biologique et son enfant à un moment crucial de son développement (voir les livres de Nancy Newton Verrier).
2. Identité en construction
L’absence de récits sur les origines, le décalage entre les attentes et la réalité adoptive, tout cela peut fragiliser l’image de soi.
3. Traumatisme précoce ou prénatal
Exposition à des substances pendant la grossesse, négligence, violence ou séparation brutale peuvent perturber le développement du cerveau émotionnel, ou simplement la blessure primitive qui résulte de la séparation physique entre la mère biologique et son enfant à un moment crucial de son développement (voir les livres de Nancy Newton Verrier).
4. Absence de parole autour de l’adoption
Quand le récit de vie reste tabou ou flou, les émotions s’accumulent et peuvent s’exprimer autrement : addictions, troubles alimentaires ou conduites à risque…
Comment accompagner les personnes adoptées confrontées aux addictions ?
Thérapie des schémas ou TCC (Thérapies Cognitivo-Comportementales) centrée sur l’attachement
Pour explorer les schémas de rejet, d’abandon ou d’imperfection, souvent à la racine des comportements addictifs.
EMDR ou ICV (intégration du cycle de la vie)
Ces thérapies permettent de traiter les traumatismes précoces, même sans souvenirs clairs.
Groupes d’entraide spécifiques
Certains groupes AA ou NA accueillent des espaces spécifiques pour les personnes adoptées. La parole y est plus libre, et le sentiment de solitude diminue.
Travail sur l’histoire adoptive
Rechercher des informations sur les origines, mettre en récit son passé, même partiellement, peut être réparateur. C’est aussi un levier puissant pour sortir de l’addiction en retrouvant un fil conducteur intérieur.
Comment passer de l’addiction à la résilience ?
L’addiction, pour les personnes adoptées, est souvent une tentative maladroite de prendre soin de soi. Elle n’est pas une faiblesse, mais un signal. Derrière elle se cache souvent un besoin de reconnaissance, de sécurité et de sens.
Pour cela, il faudra remplacer les habitudes de dépendances par de nouvelles habitudes saines et durables. C’est donc un « marathon » où il faut être patient tout en restant persévérant.
Un accompagnement adaptée, spécifique et sans jugement, peut non seulement renforcer ce processus de changement, mais aussi aider à se réapproprier notre histoire et en faire une force.
J’accompagne en TCC (Thérapies Cognitivo-Compotementales) pour vous aider si besoin (voir les types d’accompagnements ici).
Prenez soin de vous.
Sources
- Lisa Coppola, LMHC – bpar.org
- Marine, adoptée – lejournalduneadoptee.com
- Témoignage Reddit – reddit.com/r/Adoption
- Conseil National Adoption & Addictions – adoptioncouncil.org